Test Sniper : Ghost Warrior 3

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PS4

A l'image du conflit qui a opposé durant des années les licences FIFA et PES, les séries Sniper Elite et Sniper : Ghost Warrior jouent des coudes depuis un moment pour s'attirer les faveurs des amateurs de fusils à lunette. Alors que le quatrième opus de Rebellion a défié le Reich avec succès en février dernier, le troisième titre de City Interactive Games, plus contemporain, arrive-t-il lui aussi à faire mouche ?

O'Brothers

Pendant que Sniper Elite 4 nous met face à des missions pouvant modifier l'issue de la Seconde Guerre Mondiale, le scénario de Sniper : Ghost Warrior 3 a une ampleur beaucoup moins historique et bien plus personnelle. L'histoire narrée ici est celle de Jon et Robert North, deux frères devenus compagnons d'arme dont la dernière mission derrière les lignes ennemies en apparence tranquille vire à la déconfiture. Le plus petit de la fratrie se fait enlever par le tyran local pour brider les envies de rébellion du plus grand. Ce scénario de série B qui aurait en son temps suffi à dresser un Scharzenegger ou un Stallone face à une armée n'a pas l'air de trop perturber Jon puisqu'il décide malgré son implication personnelle de ne pas faire de vagues au sein de la hiérarchie et de continuer à suivre la voix de son maître. Au lieu de foncer dans le tas une pétoire à la main, il continue de remplir les missions ingrates en Géorgie tout en agissant en sous-marin pour récupérer son frère. Pas de quoi mériter un Oscar que ce soit au niveau du scénario ou du jeu d'acteur. Les protagonistes sont plutôt fades, leurs expressions faciales figées donnent l'impression qu'ils sortent tous d'un AVC, et certains doubleurs français prennent leur job par-dessus la jambe. Cette mascarade sert surtout à glisser une vingtaine de missions obligatoires avant d'atteindre le frangin au lieu de boucler le sauvetage en une seule expédition punitive à la Predator : de quoi nous occuper durant quatre actes répartis sur plusieurs cartes ouvertes à la Far Cry.

La série d'Ubisoft a dû faire forte impression aux développeurs de CI Games tant on a parfois le sentiment d'être devant un copier / coller de la saga ou un spin-off du pauvre. On retrouve ce système de monde ouvert à arpenter librement à pied ou en voiture jusqu'à débloquer des portails de voyage rapide qui permettront de gagner du temps de déplacement. L'état-major nous confie régulièrement de nouvelles missions par le biais d'un ordinateur portable accessible depuis votre planque. Le passage obligatoire par votre quartier général entre deux piges vous permet également de dépenser votre solde dans de nouvelles armes améliorables (snipers, mitrailleuses, pistolets) et équipements (grenades, kits de soin) et de fabriquer des munitions (différents types de balles) et gadgets (des kits pour silencieux) depuis un établi. Une bonne nuit de sommeil requinque notre homme, fait passer le temps si vous voulez profiter du cycle jour / nuit pour agir (sans grand impact malheureusement) et sauvegarde la progression. Comme d'habitude, un système de points d'expérience sanctionne positivement votre avancée, à répartir ensuite sur un arbre de compétences selon trois voies à emprunter (neuf compétences par style). Si vous privilégiez le tir à distance, dépensez vos points dans l'onglet Sniper (meilleure concentration par exemple), si vous êtes du genre à arriver dans le dos de vos ennemis, claquez tout dans la rubrique Fantôme (meilleure furtivité et vitesse de déplacement) et si vous avez la gâchette facile, faites tapis sur l'option Guerrier (meilleure endurance et plus de munitions pour n'en citer que deux). Trois styles de jeu pour trois façons différentes de jouer, même s'il faut bien avouer qu'ils sont complémentaires selon le déroulé de votre mission. Quand votre couverture saute vous êtes bien obligé de tirer par rafales et en intérieur il est plus utile de suriner que de sniper à dix mètres. Prendre un soldat par surprise permet aussi de l'interroger pour lui soutirer des infos sur des caches d'armes par exemple.


Le fait d'avoir opté pour un monde ouvert n'offre néanmoins qu'un sentiment de semi-liberté. L'étendue des cartes est limitée, les tâches annexes (tuer une cible, libérer un avant-poste, sauver des otages) sont globalement inutiles (au mieux récupérer des ressources pour votre bricolage), les allers-retours à votre grotte sont usants et votre interaction avec l'environnement est quasi-nulle, que ce soit avec les civils ou les rares animaux croisés dont on peut seulement « fouiller » les dépouilles. La plupart des portes et voitures sont verrouillées pour mieux tenir en laisse. On sent que notre militaire est un infiltré censé être le plus discret possible et non pas un révolutionnaire bruyant comme dans Far Cry 4. A moins que ce soit le manque de budget qui bride les possibilités qui nous sont offertes. Le studio se montre pourtant étonnement généreux en offrant (temporairement ?) son season pass sur PlayStation 4, délivrant ainsi deux extensions en solo, deux cartes multijoueur, un buggy, le fusil McMillan TAC-338A et un arc à poulies sans frais supplémentaire. Un cadeau en guise d'excuses pour le retard ou une réponse au lynchage de la presse internationale dont il est victime, allez savoir. Par contre pour le multijoueur il faudra repasser au troisième trimestre de l'année, il n’existe tout simplement pas encore !

La Menace Fantôme

Naturellement si vous montrez un intérêt pour cette production, c'est que vous avez une affinité particulière avec le snipe et le plaisir coupable de tuer de loin comme un lâche. Les fusils à lunette, les tirs furtifs à plusieurs centaines de mètres et la discrétion d'une manière générale sont évidemment au cœur du gameplay. La balistique répond encore une fois aux critères incontournables de réalisme et la trajectoire tient compte de la distance, du vent et de la gravité. Placer votre arme à un endroit plat réduit les mouvements, régler le zoom et la distance assure une bonne précision et retenir son souffle fait apparaître le réticule d'impact accompagnée de la bonne vieillie cinématique qui suit la balle jusqu'à destination si vous faites mouche (supprimable dans les options). Le réalisme croit dans les niveaux de difficulté supplémentaires dont le mode Défi qui compte davantage sur la personnalisation de votre arme (pied, lunette, pointeur) que sur la technologie et les aides à l'écran. A ce propos cet opus introduit un drone très pratique pour marquer les cibles à distance. Presque indétectable par l'ennemi, cet ange-gardien peut par la suite être équipé d'une vision nocturne, thermique, pourra pirater des terminaux et distraire des ennemis depuis les cieux. Pratique et rapidement indispensable, au même titre que le mode reconnaissance (bouton L1) mettant en surbrillance des éléments autrement invisible comme des traces de pas ou des corniches sur lesquelles grimper. Vivez la happy technologie.

Ses retards à répétition (il devait sortir en janvier), ses 9 gigas de correctifs à l'installation (fixant des bugs et ajoutant le HDR entre autres) et son interminable temps de chargement au lancement du jeu (plusieurs minutes !) mettent la puce à l'oreille : l’accouchement de Sniper : Ghost Warrior 3 s’est fait dans la douleur et il en porte les séquelles. Le CryEngine a connu des jours meilleurs entre de meilleures mains, et accuse ici une valse de baisses de frame-rate, de bugs en tous genres voire de plantages dans de très rares cas. C'est d'autant plus gênant que le monde ouvert ne se justifiait pas tant que ça et que graphiquement le titre n’est pas sublime pas plus. Les environnements font illusion de loin avec quelques beaux effets de lumière, des reflets par temps pluvieux, de belles explosions mais en zoomant un peu – ce qui est le propre du jeu de sniper ! - les textures apparaissent vite comme baveuses et grossières (sol et écorces notamment). Tout est statique, peu interactif, manque de vie et d’ambiance même s'il faut saluer la bonne distance d'affichage nécessaire à la visée. La modélisation des soldats-clones est digne de la précédente génération de machines (les visages sont hideux), leur intelligence artificielle est poreuse et il manque l'effet gore de la Kill Cam de Sniper Elite. Une balle de ce calibre ne ressort pas sans faire de gros dégâts. Après une musique d'introduction sortie d'un pays d'ex-union Soviétique la bande-son a la bonne idée de nous laisser un peu en paix, n’intervenant que lors des instants tendus des missions. Si vous ne voulez pas souiller vos tympans, coupez la radio en voiture et changez la langue des doublages : le français est parfois à côté de la plaque. Gardez votre concentration pour l'ennemi, vous en aurez besoin durant la petite dizaine d'heures nécessaire pour boucler ce titre imparfait mais tout de même fréquentable si vous avez déjà terminé Sniper Elite 4 et que vous attendez le prochain Far Cry de pied ferme.

Notre verdict

On aime

  • Le plaisir du snipe
  • Le Far Cry du pauvre
  • Les compétences évolutives
  • Le drone bien pratique
  • Le season pass gratuit

On n'aime pas

  • Les temps de chargement à rallonge
  • La musique des menus et certains doublages français
  • Des lacunes techniques
  • Peu de choses annexes à faire
  • Le retour obligé à la planque
  • Le scénario-prétexte en retrait
  • Pas encore de multijoueurs

La série Sniper : Ghost Warrior a toujours été considérée comme « moyenne » et ce troisième opus ne fait pas exception même s'il relève légèrement la tête après un second opus décevant. Ses tares techniques en voie de correction et ses indélicatesses graphiques mises à part, c'est surtout le manque de profondeur de son monde ouvert et sa mise en scène au rabais qui calment les ardeurs. Ceux qui aiment fusiller de loin y trouveront sans doute le compte mais plus de budget et de temps de développement auraient donné une autre tournure à cette production sortie trop tôt. La volonté de bien faire est là mais il manque encore quelque chose pour en faire un titre recommandable l’œil fermé.

Note finale : 6 / 10
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