En choisissant un format épisodique pour les dernières aventures de l’Agent 47, Io Interactive et Square Enix n’ont pas facilité la tâche des pauvres testeurs que nous sommes : difficile en effet de juger un jeu complet à partir d’un simple échantillon, un tel exercice ne s’effectuant habituellement que dans le cadre d’une preview. Les choses sont aujourd’hui différentes puisque le dernier épisode du nouveau Hitman est disponible depuis deux semaines, et que le jeu a reçu il y a quelques jours un patch exploitant les capacités de la toute nouvelle PlayStation 4 Pro. Il est donc temps d’enfiler à nouveau le costume du tueur à gages le plus connu du petit monde vidéoludique, et de suivre ses nouvelles aventures dans leur intégralité.

Outre la possibilité de découvrir toute l’histoire de ce Hitman d’une traite, notre attente de quelques mois nous aura aussi permis de profiter de tous les patchs proposés par Io Interactive depuis la sortie du premier épisode. En vrac nous avons ainsi pu bénéficier d’une IA peaufinée, d’une interface plus intuitive, et globalement d’une expérience plus stable (entendez par là moins buggée !) qu’en mars dernier. C’est toujours ça de pris !

Une narration décousue

Pour ceux qui n’auraient jamais entendu parler de la série, rappelons qu’il s’agit d’une ode à l’infiltration renvoyant par certains aspects au vénérable Metal Gear Solid. La différence majeure est que vous incarnez ici un tueur à gages, l’Agent 47, employé par une organisation baptisée ICA (International Contract Agency) qui organise des assassinats pour les clients de tout poil : peu importe leur nationalité ou leur orientation politique, le principal est qu’ils puissent payer. Déployé dans différentes zones semi-ouvertes, notre anti-héros devra éliminer les cibles qui lui ont été désignées en utilisant mille et une ruses, et en observant à tout prix deux règles de base : épargner les innocents, et ne pas se faire repérer.

D’un point de vue chronologique, le prologue du jeu se déroule quelques mois avant le tout premier opus de la série lorsque 47 rejoint l’ICA, tandis que les épisodes principaux prennent place après les évènements de Hitman : Absolution. Après avoir visité la base secrète de votre employeur vous partirez donc aux quatre coins du monde et plus précisément à Paris, Sapienza, Marrakech, Bangkok, dans une petite bourgade du Colorado et à Hokkaido. Si vos premiers contrats ne paraitront pas tellement différents de ceux effectués auparavant, vous et votre agent de liaison Diana Burnwood réaliserez rapidement qu’ils sont en réalité connectés, et que quelqu’un se sert de votre tandem infernal pour servir une cause encore inconnue.

Nous ne vous en dirons évidemment pas plus ici, mais sachez que le scénario développé par Io Interactive s’intéresse au passé de 47 et devrait donc séduire tous les fans de la série. Là où le bât blesse c’est que la narration n’est supportée que par de courtes cut-scenes avant et après chaque mission, des séquences qui ont tout de même un peu de mal à vous replonger dans l’intrigue principale en moins de deux minutes alors que vous pouvez aisément passer deux heures sur une mission ! Précisons en outre que les dialogues sont exclusivement en anglais, avec sous-titres français, alors que la plupart des précédents volets avaient eu droit à un doublage dans la langue de Molière.

Un gameplay extrêmement riche

Une fois lâché sur sa zone de mission, notre tueur a carte blanche pour parvenir à ses fins : à vous de bien repérer les lieux et d’observer les habitudes des cibles pour trouver le meilleur moyen et le moment propice pour vous en débarrasser. Votre instinct (R1) sera un allié précieux, puisqu’il mettra en surbrillance les objets intéressants et indiquera la position des personnages proches, même à travers les murs. Vous pourrez ainsi fouiner un peu partout et écouter aux portes pour obtenir des renseignements utiles à la préparation de votre forfait, au risque toutefois de vous faire remarquer si vous ne prenez pas vos précautions.

Chaque environnement est en effet peuplé de personnages aux rôles bien précis (cuisinier, médecin, musicien, militaire…) qui ont accès à des zones spécifiques : pour vous fondre dans la masse il faudra donc revêtir le costume adéquat, soit en le piquant dans un vestiaire, soit en neutralisant un PNJ qui le porte. Dans ce second cas, et plus généralement à chaque fois que vous assommerez quelqu’un, il faudra impérativement penser à cacher le corps dans une benne ou un placard : si un autre personnage le découvre, vous pouvez être certain que l’alerte sera donnée et que les choses se compliqueront !

Une fois le bon costume enfilé, vous pourrez donc pénétrer dans certaines zones particulières et poursuivre vos investigations. Seulement voilà, les PNJ peuvent se connaître entre eux et certains peuvent donc remarquer que vous n’êtes pas à votre place : à vous de les contourner ou de les neutraliser, le but étant de tout faire pour que votre déguisement ne soit pas compromis. Le cas échéant, il vous faudra vous échapper et changer à nouveau de costume pour retrouver l’anonymat. Attention toutefois, un costume compromis durant la mission le reste jusqu’à ce que celle-ci soit terminée.

Outre le système de déguisement, le jeu permet à 47 de transporter de multiples objets utiles à sa mission : un tournevis ou une clé anglaise pour trafiquer un mécanisme, du vomitif pour empoisonner un personnage, des cartes magnétiques ou des clés pour ouvrir des portes, mais aussi tout un tas d’armes diverses et variées plus ou moins discrètes. Dans cette dernière catégorie, certaines sont forcément apparentes comme le fusil d’assaut, et ne seront tolérées que si vous portez le costume correspondant. D’autres peuvent être dissimulées afin de ne pas éveiller les soupçons, mais seront détectées si vous devez subir une fouille pour entrer dans une zone surveillée : il faudra alors les cacher discrètement dans les poubelles et autres petits containers prévus à cet effet, puis trouver d’autres équipements une fois la fouille passée.

On en profite pour préciser aux plus téméraires que si l’attaque frontale arme au poing est toujours possible, elle ne sera quasiment jamais couronnée de succès : 47 est certes un maître assassin mais il n’a rien d’un Rambo capable d’affronter une armée à lui seul !

Un jeu accessible à tous

Vous l’aurez deviné, les costumes, accessoires et armes disponibles permettront à 47 d’atteindre ses cibles de différentes manières, leur multiplicité pouvant toutefois se révéler un peu intimidante pour les non-initiés. Heureusement Io Interactive a mis en place un système baptisé « opportunités », qui permettra au joueur de suivre des mini-scenarios particuliers en détaillant les actions à accomplir successivement. Il convient toutefois de préciser que ces aides permettront seulement de gratter la surface du jeu, et que ce n’est qu’en rejouant chaque mission encore et encore que vous parviendrez à réellement exploiter le gameplay et à accomplir les innombrables défis proposés.

D’ailleurs, les missions réussies et les défis complétés vous octroieront une certaine quantité de points d’expérience qui s’accumuleront pour faire grimper votre niveau de maîtrise de la mission en question. Vous débloquerez au passage de nouveaux éléments à utiliser lors de vos préparatifs : points d’entrée additionnels, nouvelles caches de contrebande où vous pourrez entreposer les accessoires de votre choix, différents costumes pour démarrer la mission… Bref, plus vous rejouerez une mission, plus celle-ci vous offrira de possibilités pour l’accomplir !

Pour les joueurs hardcore il n’est sans doute pas inutile de préciser que les différentes aides disponibles sont toutes désactivables, et qu’ils peuvent donc parcourir l’aventure sans utiliser l’instinct, les opportunités ou même la mini-map qui indique constamment la position des personnages alentours.

Un contenu fourni

Outre sa campagne composée d’un prologue et de six véritables missions, ce nouveau Hitman reconduit le système de Contrats customisés qui permet à chaque joueur de créer ses propres challenges : sélectionnez un lieu, désignez une cible, fixez les règles liées aux costumes et aux armes, puis réussissez la mission pour pouvoir la partager sur la toile. Un système utilisé par les développeurs eux-mêmes avec les Cibles Fugitives, des contrats auxquels vous ne pouvez participer qu’une seule fois et qui ne sont disponibles que pendant un temps donné.

D’autres contrats baptisés Escalade sont disponibles pour chaque destination, et vous proposent de réussir cinq fois de suite la même mission avec à chaque fois des cibles ou des contraintes additionnelles vous rendant la tâche plus complexe. Non seulement on vous impose généralement le déguisement et l’arme pour chaque élimination, mais on pourra en plus vous demander de récupérer des documents, de cacher tous les corps ou encore de n’assommer personne. Amateurs s’abstenir !

Précisons enfin que les joueurs PS4 peuvent aussi profiter de six contrats additionnels regroupés sous l’appellation The Sarajevo Six, qui voit 47 se lancer à la poursuite des membres d’une redoutable faction paramilitaire.

Une technique qui tient la route

Construit autour de la deuxième version du Glacier Engine qui visait à offrir une simulation et un rendu des foules plus crédibles que par le passé, on peut dire que Hitman atteint parfaitement ses objectifs dans ce domaine : il suffit pour s’en convaincre d’assister au défilé de mode de Paris, ou de fendre la foule des manifestants à Marrakech. Certes les animations de 47 comme des PNJ restent un tantinet rigides, mais le nombre de personnages à l’écran est conséquent, et tous semblent avoir une activité précise. Les environnements sont quant à eux convaincants, variés, et intelligemment construits.

Côté performance on pourra légitimement reprocher au jeu un aliasing un peu trop présent et une fluidité mise à mal sur la PlayStation 4 de base, deux phénomènes largement corrigés avec le récent patch dédié à la version Pro de la console qui n’implémente toutefois pas le support du HDR : on espère pour les joueurs équipés qu’une nouvelle mise à jour viendra corriger cet oubli.

Puisque nous en sommes au stade des petits reproches, autant mentionner les temps de chargement particulièrement longs qui feront pester les perfectionnistes, toujours prompts à recharger leur partie dès que leur plan ne se déroule pas comme prévu. Plus gênant encore, le fait que le jeu fasse la distinction entre la progression « en ligne » et « hors ligne » pénalisera sérieusement les joueurs déconnectés puisque ceux-ci n’auront pas accès aux défis de chaque mission. Ils ne pourront donc pas les réussir pour augmenter leur niveau de maîtrise, et ne profiteront ainsi pas vraiment de la rejouabilité du titre : un parti-pris étonnant qui ne semble pas franchement justifiable par une quelconque contrainte technique.