Test Resident Evil 2 (2019)

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PS4

Œuvre mythique symbole de la génération 32-bits, Resident Evil 2 est un jeu culte entouré de légendes et d’anecdotes qui lui confèrent un statut particulier dans la saga. Pensée rapidement après le succès du premier Resident Evil en 1996, cette suite connut un développement chaotique et une refonte totale qui engendra un prototype clandestin baptisé Resident Evil 1.5 par les fans et devenu jouable depuis quelques années grâce à la magie d’Internet. A sa sortie en 1998 sur PlayStation, le jeu (complet cette fois) explose les records et terminera sa carrière aux alentours de cinq millions d’exemplaires écoulés, toutes machines confondues. Avec ses deux campagnes, ses personnages cachés charismatiques et ses scènes d’anthologie, sa magie est restée intacte plus de vingt ans après son lancement. Les décors 2D vieillissent bien et les contrôles restent jouables pour les habitués. Qu’en est-il de la nouvelle génération de joueurs et des nostalgiques trop feignants pour ressortir leurs vieilles machines ? C’est pour eux que Capcom a annoncé voilà quelques années maintenant la mise en chantier d’un remake que nous tenons enfin entre nos mains. L’attente, interminable, est enfin récompensée.

Retour en 1998

Se le cacher serait inutile, tout le monde sait que le japonais Capcom est un adepte du recyclage de ses licences à succès dans des suites à rallonge, des versions améliorées, des remasterisations et des remakes. La série Resident Evil n’a pas échappé à cette tradition et connaît déjà de nombreuses améliorations et, évidemment, un remake monumental du premier Resident Evil. Fidèle et superbe, ce REbirth comme l’appellent les fans, reste encore aujourd’hui un modèle de mise à jour. A l’annonce d’un remake pour Resident Evil 2, nous pensions en toute logique que cette suite connaîtrait le même destin. Il en fut décidé autrement par ses auteurs. Plus qu’une refonte point par point avec la technologie actuelle, ce Resident Evil 2 est un nouveau jeu à part entière destiné aussi bien à ceux qui découvrent la saga par ce chapitre qu’aux vieux briscards qui connaissent le titre original sur le bout des doigts. Ce sont sans doute les fans les plus fidèles qui apprécieront les nombreuses références et différences entre les deux versions, et l’héritage subtil mais présent au mythique Resident Evil 1.5. Entre les modèles de certains personnages proches des artworks originaux (Ada, le Tyrant), des décors revenus d’outre-tombe (le stand de tir, le hall du commissariat), des armes disparues comme les grenades et le costume bonus d’Elza Walker pour Claire, les développeurs brossent le connaisseur dans le sens du poil pour un résultat réconfortant. Comme si toutes les bonnes idées de l’épisode avorté et du définitif fusionnaient pour un résultat grandiose capable de mettre enfin tout le monde d’accord en 2019.


Porté par le moteur maison RE Engine déjà à l’œuvre sur Resident Evil 7, ce remake opte pour une représentation en 3D intégrale avec une caméra à la troisième personne autorisant des rotations libres à 360° autour des héros. Nous parlons bien ici au pluriel puisque vous incarnerez tour à tour Leon S. Kennedy et Claire Redfield. Le premier est une jeune recrue qui s’apprête à prendre son poste à Raccoon City sans se douter que la ville est exposée depuis quelques jours à la propagation du virus T transformant les êtres vivants contaminés en d’horribles zombies, tandis que la seconde, sœur cadette du charismatique Chris du premier volet, fait le même trajet pour retrouver son frangin. Leurs deux destins vont s’unir le temps d’une nuit en enfer dont ils ne ressortiront pas indemnes. Chaque personnage dispose de sa propre campagne avec des rencontres, événements, énigmes, armes et lieux (pour certains) qui lui sont dédiés. Léon rencontre par exemple la fameuse Ada Wong pendant que Claire se lie d’affection pour Sherry Birkin. Le système de double scénarios (A et B) par personnage qui permettait de revivre l’histoire par un autre embranchement avec le même héros n’a pas totalement disparu puisqu’un scénario alternatif un poil moins développé (et moins cohérent) est toujours là en bouclant le jeu une première fois avec chacun. A grand renfort de cut-scenes très cinématographiques les campagnes principales sont mieux scénarisées et davantage imbriquées qu’en 1998. La durée de vie est un peu plus riche que par le passé puisque chaque aventure dure une huitaine d’heures avec toujours les personnages du mercenaire Hunk et de Tofu à débloquer en terminant le jeu sous conditions. Ces seconds couteaux ont le même objectif, s’échapper de la ville avec un échantillon du Virus G en se frayant un chemin jusqu’à la sortie du commissariat. Que ce soit avec le soldat d’Umbrella armé jusqu’aux dents ou avec l’aliment doté d’une lame (NDLR : j’ai mis cinq minutes à la comprendre celle-là !), le challenge est à la hauteur. En parlant de challenge, le jeu comporte trois degrés de difficulté dont un mode Extrême limitant le nombre de sauvegardes à l’utilisation de rubans encreurs là où le mode normal use de sauvegardes automatiques. Les ennemis sont aussi plus résistants et les ressources moins nombreuses pour retrouver le côté survival d’antan. Les anciens apprécieront.

Le même en mieux

Terminés les angles de caméra fixes et la visée à l’aveugle qui allait avec. Cette fois le soft opte pour une visée à l’épaule (avec de lents déplacements tout en tirant) ce qui permet un ciblage bien plus précis des corps putréfiés. Pour autant les affrontements contre les zombies ne sont pas aussi aisés que dans Walking Dead, et le jeu « triche » en nous privant de headshots avec les armes de base. Vous vous doutez bien que si la moindre cartouche 9 mm suffisait à étaler un mort-vivant, le jeu entier pourrait se boucler avec une poignée de chargeurs. A la place les déflagrations abîment les visages avec un soin du détail morbide mais laissent une chance à l’opposant de se relever pour nous grignoter dans des corps-à-corps superbement mis en scène. Le principe d’armes de riposte à usage unique est repris du REbirth avec les couteaux (cassables à la longue mais récupérables sur les corps) et les grenades à fourrer dans la gueule des monstres. Autre emprunt à un ancien épisode, des bocaux de poudre à canon peuvent être combinés pour fabriquer différentes cartouches comme dans Resident Evil 3, mais aucun choix scénaristique ou système d’esquive n’a par contre été tiré de ce chapitre. Les incontournables coffres où stocker des objets qui se téléportent miraculeusement d’un endroit à un autre sont toujours là, tout comme l’inventaire par cases mettant le jeu en pause quand on le consulte. Ce dernier peut être agrandi en récupérant plusieurs sacoches de transport et il est enfin possible de jeter un objet qu’on est sûr de ne plus utiliser, marqué par un symbole identifiable. La nouvelle carte est enfin d’une aide précieuse pour s’extirper de ce labyrinthe étant donné qu’il met en lumière les zones non explorées, celles où une action est encore possible et marque automatiquement la présence de munitions et d’objets clés. A consulter régulièrement tant le level design est différent tout en restant dans une géométrie connue.

Les créatures classiques répondent presque toutes à l’appel sans qu’aucun ajout inoubliable à la Lisa Trevor ne viennent chambouler les aficionados. Regret pour certains, respect et fidélité pour d’autres. C’est une question de point de vue. Les morts-vivants – l’ennemi de base – sont méconnaissables par rapport à 1998, tant de leur diversité que leurs réactions. Décomposés et hideux, ils avancent avec détermination, capables de défoncer les fenêtres qu’il faudra barricader ensuite avec des planches pour éviter le renouvellement des générations. Ils peuvent désormais ouvrir les portes (les lickers aussi !) et nous suivre dans les couloirs. La pression grimpe forcément d’un cran avec une horde aux fesses, un chargeur vide et une blessure apparente sur le costume. La peur, sans être traumatisante, fait son grand retour notamment grâce à une utilisation ingénieuse des couloirs sombres à éclairer à la lampe de poche. La tension est palpable, les sursauts bien présents. Évidemment ce remake se justifie surtout par le fossé technique entre les deux versions, les nouveaux graphismes offrant un rendu photoréaliste des décors du plus bel effet, bourrés de détails gores (les traces de pas ensanglantés) et de souvenirs pour les fans. Il lui manque juste un moteur physique plus performant qui aurait évité quelques bugs de collision et enchevêtrements entre les cadavres et les portes. Les modèles des personnages sont sidérants de réalismes durant les cinématiques, entre leurs expressions faciales troublantes, la synchronisation labiale parfaite en VOSTFR (des doublages français convenables sont également inclus), les textures de peau, l’intensité dans le regard et les mouvements de leurs cheveux. Une prouesse que nous aurons le loisir d’admirer dans une galerie, au même titre qu’une série de concept arts et de tenues bonus à s’offrir en DLC.


Capable de satisfaire à la fois les premiers venus et les initiés, le jeu serait proche du sans faute s’il ne s’était pas foiré sur l’ambiance sonore, élément crucial pour un survival horror. Alors que les Resident Evil ont l’habitude de diffuser une musique par salle, ce remake fait le parti pris du minimalisme avec des mélodies discrètes voire absentes pour se concentrer sur les bruitages d’ambiance. Le bois qui craque, les portes qui claquent, le parquet qui grince sous le poids d’un marcheur sont bien là mais il manque une identité sonore plus marquée, capable de nous foutre la frousse dès qu’on entre dans une nouvelle zone. La solution se trouve naturellement dans l’édition Deluxe du jeu contenant la bande son originale du jeu de 1998 pour remplacer celle du remake vraiment trop dans la réserve. Pour le reste, c’est une réussite totale à redécouvrir d’urgence.

Notre verdict

On aime

  • La réalisation fabuleuse
  • Enfin du vrai survival-horror
  • Un remake plein de références
  • Des nouveautés pour surprendre les fans
  • Des personnages secondaires plus travaillés
  • Du gore à foison
  • Des zombies qui font à nouveau peur
  • La carte enfin utile
  • Le côté retour aux sources

On n'aime pas

  • Les musiques pratiquement absentes
  • Quelques petits bugs anodins
  • Toujours des incohérences entre l’histoire principale et la secondaire

Le Resident Evil 2 de 1998 a toujours été un grand jeu et son remake ne pouvait être qu’un chef-d’œuvre absolu jouissant enfin d’une réalisation à la hauteur des standards actuels et d’une prise en main gommant la rigidité légendaire de la saga. Le résultat est à la hauteur des espérances et dépasse même les attentes sur certains points, en incorporant par exemple quelques éléments de Resident Evil 1.5, le chaînon manquant de la série, et en rajoutant du contenu inédit (zone, énigmes, armes…) pour surprendre les fans. Ceux qui découvrent ce jeu d’horreur largement inspiré du cinéma de genre en prendront plein la tête, les nostalgiques y trouveront une autre saveur tout aussi délicieuse.

Note finale : 9 / 10
Les commentaires
Le
Bravo pour ce test très plaisant à lire ! Je voulais pas craquer tout de suite car j’ai trop de jeux à faire, mais là ça va être dur de résister :D Du coup, pas merci Vincent !
Ace

Ace

Le
J'ai tout lu aussi. Vincent a l'art de la narration, et comme d'hab il ne pouvait pas s’empêcher de parler du 1.5 :D
Le
C'est un peu mon Graal à moi :-D

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