Test Final Fantasy VII Remake

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PS4

Vingt-trois ans après sa sortie, on ne présente plus Final Fantasy VII. Tout a été dit sur ce titre culte de la PS One, celui qui a grandement contribué à la promotion du RPG à la japonaise en Occident. C'est ce succès mondial (plus de 11 millions d’exemplaires vendus) qui lui vaut aujourd'hui de revenir dans un écrin tout neuf, du moins son premier « chapitre ». Oui, FF VII Remake est enfin là, après des années d'une longue et fébrile attente. Cette relecture fait-elle honneur au mythe de l'original ? On vous dit tout.

Premières secondes, premiers frissons. Dès sa cinématique d'ouverture, plus incarnée encore qu'en 1997, Final Fantasy VII Remake parvient à mettre les fans de l'épisode original dans sa poche. Du ciel étoilé où apparaît en fanfare le logo du titre, la métropole cyberpunk de Midgar n'a jamais paru aussi complexe, fourmillante de vie et de détails. C'est une nouvelle claque, deux décennies après. A peine le temps de raccrocher sa mâchoire que la caméra plonge sur le quai menant au réacteur Mako n°1 où Cloud Strife, le regard déterminé, crève à nouveau l'écran. Le jeune mercenaire est prêt à en découdre avec la Shinra, son ex-employeur, aux côtés du groupe terroriste Avalanche. Ensemble, ils vont tenter de sauver le monde du joug de cette entreprise omnipotente, qui épuise sans vergogne l'énergie de la planète (la Mako) pour son propre profit.


Ecologie, dérives du capitalisme, inégalités sociales grimpantes, militantisme... Aujourd'hui encore, les thématiques de Final Fantasy VII restent plus que jamais d'actualité. Sans insister beaucoup plus qu'il ne le faisait déjà en 1997, le remake parvient tout de même à se montrer plus démonstratif encore, parce qu'il donne à voir la population de Midgar à hauteur d'homme et non plus à travers cette vue de dessus, si distante, propre aux décors en 2D précalculée du jeu d'origine. La technique aidant, les bidonvilles deviennent plus animés, notamment en nombre de PNJ mais aussi grâce à toutes ces conversations qui égayent chaque coin de rue. Par ailleurs, certains « donjons » proposent de la narration par l'environnement, où un élément de décor va par exemple témoigner un peu plus de la vie sous les plateaux ou, dans un autre cas, justifier la présence d'ennemis dans une zone. FF VII R ne s'est pas contenté de reprendre tous les endroits traversés tels quels dans les premières heures du jeu original (rappelons qu'il ne s’agit pas ici d’un remake intégral !), il leur confère un supplément d'âme qui renforce grandement l'immersion. Les fans y retrouveront leurs marques avec émotion tant le jeu est généreux en fan service, en clins d'œil malins, mais ils auront aussi la bonne surprise de découvrir des chapitres inédits, qui approfondissent un peu plus la connaissance de Midgar et de ses habitants. Certains personnages, à l'image de la très attachante Jessie, en sortent grandis.

Il fallait bien ça pour faire en sorte que le début de Final Fantasy VII tienne sur plusieurs dizaines d'heures de jeu (contre environ sept en 1997). Seulement, cet effort d'enrichissement ne se montre pas toujours aussi pertinent. En premier lieu du côté des nouveaux personnages secondaires, qui se révèlent pour la plupart très anecdotiques (Roche, bof bof...). Ajoutées au chausse-pied dans les chapitres des bidonvilles, les quêtes secondaires sentent également le remplissage facile. Parce que simplistes et proprement inutiles au développement du lore, elles ont malheureusement tendance à casser le rythme d'une aventure pourtant enlevée. Seule la partie consacrée au Wall Market vaut le détour, là encore pour le soin et surtout, le brio avec lequel elle a été enrichie et reconstituée. Ces digressions amènent forcément quelques modifications par rapport au récit original mais qu'on se le dise, rien qui ne bouleverse dramatiquement le déroulement des événements (on y reviendra !) ni la cohérence globale de l’œuvre.

Un gameplay hybride rudement efficace

A l'image de sa narration, Final Fantasy VII Remake a aussi pris le parti d'adapter le gameplay de l'époque, sans pour autant en renier les racines profondes. On se retrouve ainsi devant un Action-RPG très contemporain, à la 3ème personne, vif et nerveux à l'écran, qui aurait repris à son compte le système ATB introduit pour la toute première fois dans... Final Fantasy V, sorti en 1992 sur SNES. Pour la faire courte, vous contrôlez votre personnage comme dans n'importe quel Kingdom Hearts (une référence somme toute évidente) et pouvez effectuer des attaques simples sur vos ennemis en martelant simplement la touche Carré, façon button masher. Cependant, pour recourir à la magie, à des invocations ou à des compétences spéciales (bref, aux coups qui font le plus mal) il vous faut consommer une à deux barres d'ATB, une jauge qui se remplit plus ou moins vite pendant un combat, selon que vous attaquez ou que vous encaissez des coups. Il faut aussi avoir en tête que les personnages ont certaines prédispositions, plus marquées que par le passé, qu'il convient d'utiliser à bon escient pour tirer le maximum de votre équipe. Sans surprise, Cloud est un attaquant puissant et plutôt versatile, Barret encaisse bien et excelle dans le combat à distance, Tifa est douée pour faire monter la jauge de Choc et Aerith, elle, est plutôt dédiée à la magie.

Naturellement, on retrouve l'excellent système de matérias de FF VII, qui permet d'équiper des compétences de magie (les attaques élémentaires, le soin, etc…), de commandes ou de soutien à nos héros. Si leur nombre et les possibilités d'associations offertes peuvent paraître ici plus limitées, il ne faut pas oublier que le remake ne couvre qu'une infime partie de l'aventure originale. Les six invocations présentes n'en demeurent pas moins impressionnantes, bien qu'elles ne soient activables que durant les gros combats du jeu. A noter qu'il est désormais possible d'améliorer toutes les armes du jeu, via un sphérier (à la FF X) où l'on dépense des PA qui s'obtiennent essentiellement au fil de la montée en niveau des persos. Ces points permettent d'améliorer directement les stats des héros (pour peu qu’ils soient équipés de l'arme en question), d'ajouter des slots de matéria et de faciliter certaines tâches en combat (regain de points de magie, de vie, boost de Transcendance,etc.). Sobre et efficace.

La bonne idée du jeu réside surtout dans la pause active qui, par une simple pression, sur la touche Croix permet de ralentir l'action pour prendre le temps de bien réfléchir à sa stratégie. D'autant que l'on peut aisément switcher d'un personnage à l'autre pour dicter à chacun la prochaine commande à réaliser. L'IA n'étant pas des plus autonomes (on en viendrait à regretter les gambits de FF XII), le joueur est constamment en contrôle, très actif et impliqué dans chaque bataille. C'est d'autant plus vrai contre les boss (très nombreux !), des sacs à PV et à phases multiples qui nécessitent souvent une bonne coordination entre les personnages pour exploiter au mieux leurs faiblesses. Il s'agira avant tout de les mettre en état de « Choc » (une feature héritée de FF XIII) pour leur occasionner alors le plus de dégâts possible le temps de cette brève vulnérabilité. D'une certaine manière, le système de combat de Final Fantasy VII Remake représente l'aboutissement de plusieurs années d'expérimentation, de FF XIII à FF XV, en passant par Kingdom Hearts. Tetsuya Nomura n'a jamais caché sa volonté de proposer des fights qui soient visuellement aussi spectaculaires à regarder que réellement plaisants à jouer. A force de tentatives plus ou moins fructueuses, le réalisateur japonais et son équipe semblent avoir trouvé la formule idoine, sans empiéter sur la dimension stratégique du J-RPG traditionnel. C'est là une véritable prouesse, un tour de force et mieux encore, un leitmotiv à la progression. Les combats de boss sont ainsi tellement exaltants que l'on espère toujours enchaîner le suivant, avec cette furieuse envie de trouver ses failles et de tout mettre en œuvre pour l'occire. A cet égard, le post-game offre un challenge bien plus relevé (ne comptez plus sur les potions et autres ethers), en offrant plusieurs combats inédits dans les deux « arènes » du jeu. Simplement jouissif.

Spectaculaire comme au bon vieux temps

Ce plaisir-là, on le doit aussi à cette réalisation franchement extraordinaire, qui se permet d'offrir des joutes visuellement éblouissantes (avec des effets de particules à tout bout de champ), fluides en toutes circonstances. Et ce même sur une PlayStation 4 standard, où aucune grosse chute de frame rate n'a été constatée sur notre bonne quarantaine d'heures de jeu. Le bestiaire fourni et, surtout, les personnages profitent à plein du passage sur l'Unreal Engine 4 en bénéficiant d'animations et de textures d'une finesse incroyable, ainsi que d'un niveau de détail assez remarquable, notamment au niveau du grain de peau et des expressions faciales. Encore une fois, cette réinvention technique apporte son lot de nuances nouvelles, particulièrement durant les cinématiques, ce qui pouvait parfois manquer à l'épisode 32 bits. Alors oui, dans le même temps, on croise certains décors moins bien dotés, qui tranchent même assez nettement (le bidonville du secteur 7, les environs du secteur 6) voire une image de fond à la résolution douteuse, c'est vrai... Des écarts mineurs, tenant sans doute plutôt de la concession, qui heureusement, ne sont que passagers, vite éclipsés par la progression et certains panoramas remarquables, qui renvoient une folle sensation de profondeur (on pense surtout à l'arrivée au pied du bâtiment Shinra).

La bande-son n'est pas en reste et nous présente une pelletée de réorchestrations merveilleuses. Au-delà du kif nostalgique pur et simple de fan, quel réel bonheur de voir le travail de Nobuo Uematsu ainsi célébré, de voir révélée toute la richesse de ses compositions d'époque, avec tous ces thèmes que l'on pensait intouchables et qui ici, s'entremêlent, se déclinent en plusieurs couleurs pour appuyer la narration, le tout avec une justesse d'orfèvre... Quel régal ! On en revient une nouvelle fois aux combats de boss, dont l'intensité doit évidemment beaucoup aux musiques, tout autant que l'émotion de certaines cut-scenes par ailleurs. Cela dit, tout n'est pas parfait dans cette nouvelle OST (qui tient sur 7 CD, tout de même !). Passent encore certaines expérimentations signées de Masashi Hamauzu (nous viennent à l'esprit les reprises reggae et électro d'Oppressed People, le thème du Wall Market), on goûte moins ces morceaux d'ambiance assez quelconques, ces thèmes guerriers hollywoodiens un peu too much qui, à certains moments, nuisent à l'unité musicale de Final Fantasy VII. Précisons enfin que le jeu est intégralement doublé et propose au choix, les voix japonaises, anglaises ou françaises. Dans l'ensemble, le résultat est de bonne facture (eh oui, même en VF) bien que l'on déplore certaines disparités de traduction, d'une langue à l'autre. On est tout de même loin de la localisation complètement foirée de 1997, rassurez-vous.

Le même mais différent

Si ce remake doit naturellement s'apprécier en bonne connaissance du jeu original - car il répond en tout premier lieu à l'attente des fans - comment peut-il être reçu par ceux qui découvrent aujourd'hui l'univers de FF VII, voire plus globalement la licence ? Sa solide réalisation (graphismes et mise en scène) est bien entendu un atout de premier choix, indéniable. Mais difficile de dire si le gameplay hybride saura répondre aux attentes du très grand public. Action mais pas trop, RPG mais pas trop... Il se peut que certains joueurs ne s'y retrouvent pas et ne retiennent que les relatives limites de cette hybridation (ciblage pas intuitif, IA alliée trop passive, combats plutôt simplistes en dehors des boss). Au-delà de son système de combat, d'autres pourront lui reprocher sa structure très linéaire, voire stéréotypée qui, parfois, n'est pas sans rappeler le décrié Final Fantasy XIII... Oui, FF VII R est linéaire, mais tout autant que l'étaient les premières heures de jeu de l'époque. Et qu'on se le dise, en dépit de leur mappemonde, les Final Fantasy de l'ère PS One restaient des aventures relativement dirigistes où l'histoire ne laissait finalement que peu de place aux digressions (à ceci près que les quêtes annexes étaient plus intéressantes à de nombreux égards). Reste qu'aujourd'hui, à une époque faisant la part belle aux mondes ouverts toujours plus vastes, ce parti pris aux artefacts old school peut rebuter. On reste néanmoins convaincu que ce serait se priver d'une aventure plus riche et passionnante que ses couloirs ne le laissent paraître.


Aussi, on imagine mal les fans du matériau de base bouder cette relecture, laquelle s'autorise tout de même quelques libertés. Sans vraiment spoiler, Sephiroth se signale dès la première heure, certaines réminiscences de Cloud interviennent plus tôt dans le récit... Les plus conservateurs sont prévenus.  A ce titre, il est amusant de voir à quel point FF VII R joue habilement avec son statut de remake. A la trame originale, il insère un nouvel enjeu, fort, qui questionne à la fois la destinée des héros et les attentes des fans. Tout va-t-il se passer comme en 1997 ? Ou bien le jeu osera-t-il se jouer de nos souvenirs et changer le cours d'une histoire que l'on croyait toute tracée ? La fin à grand spectacle lance des pistes très méta, qui ne plairont certes pas à tous, mais qui témoignent d'une vraie intelligence dans la façon de renouveler une histoire connue sans pour autant la bouleverser (du moins, pour l'instant). C'est franchement malin et bien amené, même si les « nouveaux venus » seront, eux, évidemment totalement hermétiques à cette mise en abyme. Malgré les efforts du scénario, il faut reconnaître que pas mal d'éléments assez importants de l'intrigue échapperont à cette catégorie de joueurs (sur le SOLDAT, le passé de Cloud, l'épisode de Nibelheim) et pourront leur poser quelques problèmes de compréhension globale. A eux d'être curieux et d'attendre le « voyage inconnu » d'un probable deuxième épisode, promis par l'écran de fin... Ou de lancer le Final Fantasy VII original, qui reste l'un des J-RPG les plus riches jamais créés. Un mythe intemporel, encore très efficace malgré son grand âge.

Notre verdict

On aime

  • Ce couloir introductif qui n'a rien perdu de sa superbe
  • La réécriture, aussi respectueuse que maline
  • Tous ces personnages, plus beaux que jamais
  • Les séquences cultes magnifiées (le Wall Market en tête)
  • Cet émerveillement constant pour les fans
  • Le système de combat, accessible et parfaitement équilibré
  • La réalisation dingue, qui renforce l'immersion
  • La fluidité de l'ensemble, même sur PS4 standard
  • Les réorchestrations aux petits oignons
  • Le challenge du New Game+ (en Hard)
  • L'expérience, différente de l'original malgré tout

On n'aime pas

  • Le ciblage, loin d'être optimal
  • Certains aspects qui peuvent paraître datés
  • Le remplissage qui casse le rythme
  • Quelques compositions qui dénotent
  • Certaines textures grossières, tout de même
  • Le format épisodique, forcément frustrant

Projet casse-gueule s'il en est, ce Final Fantasy VII Remake parvient pourtant à remplir son contrat, non sans un certain brio. Le jeu est beau, long, parfois surprenant et brille particulièrement par son système de combat, à mi-chemin entre l'Action-RPG et le tour par tour. On loue aussi le travail de réécriture qui relance l'intérêt autour du lore et n'hésite pas à jouer avec les souvenirs des vétérans. Toutefois, le jeu n'est pas exempt de défauts et pêche surtout par orgueil, comme conscient de ne retoucher qu'une infime partie de l’œuvre d'origine, d'où un certain sentiment de remplissage par instants. Mais parce qu'il est spectaculaire, bien conçu et surtout très malin, Final Fantasy VII Remake a toutes les armes pour rallier sans mal les plus sceptiques à sa cause. La marque des très grands, tout simplement.

Note finale : 8.5 / 10
Les commentaires
Le
Très bon test, bravo!
Le
Cool un test de FFVII !

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