Test Demetrios The BIG Cynical Adventure

Publié le par
PSV

Alors que les gros éditeurs s'éloignent progressivement de la PlayStation Vita et que même son constructeur lui tourne le dos, un homme seul fait de la résistance en portant sur la portable de Sony son point'n click Demetrios : The BIG Cynical Adventure sorti cet été sur PC. Ce loup solitaire c'est Fabrice Breton qui, sous la bannière Cow Cat et encouragé par le financement participatif, offre à la nomade l'un de ses jeux d'aventure les plus mémorables de l'année.

Un jeu d’rôle

Comme Kim Kardashian peut en attester, la ville de Paris est devenue bien plus dangereuse que par le passé et les vilains n'hésitent plus à vous déposséder de vos biens pendant que vous êtes chez vous. Bjorn Thonen l'a aussi appris à ses dépends, une nuit, alors qu'il dormait tranquillement après une soirée bien arrosée. Un coup de fil anonyme a à peine le temps de le prévenir qu'un cambrioleur va sévir chez lui qu'il tombe nez à nez avec le margoulin en question. Rapidement mis hors d'état de nuire, notre antiquaire parisien ne peut alors pas assister au vol d'une mystérieuse tablette dissimulée sur la statue d'un oiseau exotique en sa possession. A son réveil il devra mener sa propre enquête pour comprendre qui l'a volé et pourquoi, au risque de soulever un complot d'envergure. Il pourra compter sur sa voisine Sandra et la gosse de cette dernière pour l'aider dans sa quête. Ce scénario digne de l'album Le Secret de la Licorne de Tintin puise surtout son inspiration dans la série de jeux Les Chevaliers de Baphomet dont l'auteur est un grand fan. Le respectable Charles Cecil a d'ailleurs en quelque sorte adoubé Fabrice Breton en déposant un commentaire élogieux sur cette production sur la page Kickstarter du projet. Une consécration pour un fan.

Demetrios est un jeu d’aventure type point’n’click constitué d’écrans fixes dessinés à la main sur lesquels se balade une souris virtuelle à diriger avec le stick analogique gauche pour une vue d’ensemble, au stick analogique droit pour une vue précise zoomée ou directement avec le doigt sur l’écran tactile de la PS Vita. En cas d’utilisation des boutons physiques, la touche R permet d'accélérer la vitesse du curseur, le bouton Rond ouvre l'inventaire et le bouton Triangle ouvre le menu général donnant accès aux sauvegardes, au téléphone de notre gars et à l'objectif en cours bien visible à l'écran. Pour un meilleur confort le jeu est compatible PlayStation TV pour y jouer à la manette sur un grand écran. Comme dans un roman graphique le héros n'est physiquement présent à l'écran que sous la forme de bulles lors des dialogues. Il décrit les objets comme s'il se parlait à lui-même dans des textes français pleins d'humour et peut conserver ces items dans un inventaire. Trouver et combiner les bons éléments à donner aux bonnes personnes est le rouage principal de la progression, l'autre étant le succès à des mini-jeux bienvenus. Les énigmes sont logiques dans l'ensemble et un système d'aide épaule le joueur en cas de besoin.


La première astuce est placée sur le bouton Carré qui illumine les éléments interactifs du tableau avec des couleurs et un descriptif textuel des dits éléments. En un clic on sait immédiatement si on a oublié de checker quelque chose ou si on peut passer à l'écran suivant. La seconde aide consiste carrément en des antisèches consultables à la demande à condition de les avoir méritées en trouvant au préalable des cookies dans les décors. Chaque zone du jeu contient trois gâteaux cachés (des dizaines au total) correspondant à autant d'indices que Bjorn peut donner au joueur. Sans ces munitions il restera muet comme une carpe alors scrutez bien les coins et les recoins pour obtenir ces crédits octroyant une aide. Attention toutefois, chaque situation est limitée à trois indices maximum de plus en plus explicites, ensuite nous ne pourrez plus vous goinfrer de cookies avant l'énigme suivante. De toute façon, arrivé au troisième indice on vous donne carrément la solution alors impossible de rester bloqué très longtemps.

20 000 lieux sous la ceinture

Si l'influence de Baphomet est palpable dans le gameplay, c'est surtout du côté de Larry Laffer que lorgne le héros de Demetrios. Bjorn appartient à cette (grande) famille des losers attachants politiquement incorrects comme Philip J. Fry ou Homer Simpson. Immature, dragueur, fainéant, fauché, malchanceux, obsédé et à l'hygiène douteuse, le gars n'a rien à envier à la création 100 % polyester d'Al Lowe. La personnalité débordante de Bjorn suinte sur toute la production, en particulier dans les descriptifs hilarants des objets du décor et dans la répartie dont il fait preuve. A ce titre, n'hésitez pas à cliquer plusieurs fois sur un objet pour lire tous les commentaires possibles tant ils sont tordants. Le jeu compte plus de 15 000 lignes de texte et insister un peu permet souvent de se fendre la poire dans son coin. Certes, il faut aimer l'humour graveleux, les références sexuelles ou scato mais si ce n'est pas votre tasse de thé une option permet de limiter les réflexions de mauvais goût, voire de les supprimer carrément. Ce serait dommage de s'en priver puisque l'auteur, totalement éloigné de la pression d'un éditeur, ne fait preuve d'aucune autocensure. Une liberté belle à lire.

Demetrios renoue également avec la tradition rarissime du game over dans un point’n’click. Véritable jeu dans le jeu, réussir par tous les moyens à abréger l’existence de notre héros est un plaisir sadique récompensé par un trophée. Entre les morts aussi brutales que prévisibles (mettre les doigts dans la prise, allumer la lumière sous la douche) ou les emprisonnements pour des causes plus ou moins farfelues (soulager sa vessie dans un commissariat), Bjorn ne refuse jamais les propositions débiles du joueur pour le satisfaire. Pas de panique pour autant, le jeu sauvegarde automatiquement entre chaque tableau et vous pouvez continuer votre partie comme si de rien n'était ensuite. C'est juste pour la déconne.

Avec un seul homme à la baguette (ou presque) nous ne pouvons qu’être admiratifs devant le travail accompli sur toutes les étapes de la production : graphismes, scénario, dialogues, musiques et sons. Les limites financières et humaines se font toutefois ressentir sur la réalisation façon BD qui manque de finesse et de détails, en particulier sur certains décors dépouillés ou personnages qui manquent clairement de charme, et sur les musiques sympathiques au demeurant mais qui bouclent trop vite. Rien de rédhibitoire pour autant, l’essentiel étant davantage dans le fond que dans la forme. Ses huit chapitres répartis dans différents pays arriveront facilement à vous occuper pendant huit à dix heures selon votre niveau. Une durée de vie plutôt solide pour un titre vendu à peine à 9,99€ et proposé avec une remise de 20 % pour les membres du PlayStation Plus. A 7,99€ le délire vous n’avez aucune raison de vous priver.

Notre verdict

On aime

  • L’humour sans autocensure
  • Bjorn, un loser attachant à la Larry
  • Des dialogues et descriptifs succulents
  • Le système d’aide par les cookies
  • Bon rapport quantité / prix
  • Compatible PlayStation TV

On n'aime pas

  • Les dessins manquent de détails
  • Le character design particulier
  • Quelques mini-jeux dispensables
  • Il faut aimer ce type d’humour
  • Pas bien difficile pour les habitués

Projet ambitieux et tendu pour un seul développeur, Demetrios : The BIG Cynical Adventure parvient à remplir son contrat sans jamais décevoir. La réalisation un peu simpliste trahit les manques de moyens financiers et humains – en particulier les décors dépouillés et les personnages sans charisme sortis d'un jeu flash – mais l'aventure de longue haleine et l'humour omniprésent nous font rapidement oublier ces petits écueils pour nous concentrer sur le fond. On réfléchit un peu face aux énigmes et on se marre beaucoup devant sa console à grand coup de dialogues salaces et de réflexions déplacées. Pour moins de dix euros vous avez encore la garantie de passer un bon moment sur votre Vita !

Note finale : 7.5 / 10
Les commentaires
Le
Excellent. Project Brok 2020 à surveiller.
Le
A ce prix là faut prendre !

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